Pour lire le récit précédent de Charlotte, consultez Je suis à 41 semaines et toujours rien!
Chers parents,
J’ai perdu les eaux.
C’était doux, je me suis réveillée en sentant que le liquide chaud coulait, légèrement. J’ai tout de suite compris.
Quel soulagement immense que cela vienne tout seul finalement (in extremis!).
Je me suis levée tout endormie, avec le bonheur au coeur.
Je réfléchis : comment prévenir mon mari qui était à l’étage sans mouiller toute la maison?? Est-ce que je lui téléphone? Non, je ne veux pas le réveiller en sursaut. Il est 4 h 30, j’attrape une serviette de plage en pensant à Marie qui l’avait suggéré dans sa vidéo. Je monte et je réveille doucement le papa : « Ça y est. J’ai perdu les eaux. Tu as le temps de te réveiller ».
Je pense que Marie a dit de surveiller la couleur : c’est bon, ça coule clair comme de l’eau.
Pas encore de contractions, on a le temps. David se prépare. Il me dit que je peux m’allonger en attendant. Je me dis : il ne veut pas que je salisse sa maison ou quoi??? Un malentendu vite rattrapé.
Il attrape un petit déj rapide. Je n’ose pas : dois-je rester à jeun? Son petit-déj me laisse le temps d’entrer dans l’événement.
Les bagages sont déjà dans la voiture : nous devions aller à la maternité pour déclencher peut-être, au matin. Tout est facile et doux.
Nous arrivons à 5 h à la maternité, une sage femme ensommeillée nous accueille gentiment. Elle demande si la perte des eaux était franche (oui ça coule toujours!) et si j’ai des contractions (juste une). Elle examine (je suis à 2 doigts : ouf! ce n’est plus fermé) et m’amène au monitoring. Je me mets sur le côté, on écoute le bébé. On se regarde David et moi. On est bien.
Puis on nous propose d’aller dans notre chambre en attendant les contractions. C’est beau, cette chambre, une baie vitrée sur l’herbe. L’impression d’être au camping.
Je savais que tu arriverais avec l’aube, mon bébé.
Les contractions arrivent rapidement. A 8 h, elles se régularisent toutes les 7 minutes. On me dit que je suis à 3 cm. Si c’est comme pour ma fille, j’en ai pour environ 4 heures. Je me dis que c’est fou : autour de midi, j’aurai peut-être mon bébé!
Je regarde dehors la pie qui se promène avec élégance. Pendant que David est parti acheter à manger, une contraction plus forte me fait mal, avec l’impression que le bébé appuie fort sur le col.
Je demande où j’en suis, la sage-femme pense que ça n’a pas dû beaucoup bouger. Mais en une heure, je suis passée à 6 cm. J’ai mal, mais je sais que c’est bientôt la fin. C’est à ce stade que j’ai trouvé que ça allait vite, pour ma fille. Alors je ne demande pas la péridurale, pour pouvoir garder ce rythme rapide agréable et profiter de la « salle nature ».
La sage femme me dit très gentiment que j’ai le droit de changer d’avis, il y a tout le matériel pour la péridurale dans la salle nature. Et personne ne me jugera. C’est vraiment bien!
On m’amène en salle nature. Les sages femmes m’accueillent avec beaucoup de douceur (et me disent : « vous avez le sourire à 6 cm! »).
On nous laisse en amoureux. Je m’assois sur un ballon. Le ballon c’est plus facile que le lit, mais je n’ai pas le courage de bouger du tout. Ni de marcher, ni même de tourner sur le ballon (ça me soulageait pourtant tellement à la maison!). Je commence à me faire au nouveau rythme de contractions.
Avec David on se sourit beaucoup et on se marre entre les contractions : on est tellement heureux d’accueillir le bébé! Je n’arrive pas à croire qu’après presque un an d’attente, je vais le voir enfin. Et très très bientôt!
En une heure je sens qu’à certains moments ça devient très douloureux, le bébé appuie beaucoup. Finalement, on se décide à appeler : eh oui on a bien fait car c’est la poussée!
J’entends les sages-femmes qui disent : « on s’installe à la 5! » hop ça s’accélère : les draps sur le matelas, la couveuse/réchauffeuse au cas où, tout est là.
Laissez-le venir! Ouf, c’est bien de pouvoir laisser faire la poussée.
Les sages-femmes sont hyper encourageantes. Elles me disent que c’est super, elles me disent qu’il est là. De continuer. Encore, encore encore! Je suis dans les bras de David, il est super ce grand lit.
À partir de ces moments, pousser, je n’ai plus mal (la dilatation est complète), ça pousse juste très fort et je sens qu’il prend de la place.
En quelques poussées, j’entends : « on voit ses cheveux! et il n’a pas beaucoup de cheveux! »
Déjà! J’en pleure d’émotion, il est déjà là!!!
Les contractions ne font plus mal depuis que je pousse. J’ai juste une douleur au périnée, qui me tire. La sage femme aide en appuyant de ses doigts pour le préparer à s’étirer pour l’arrivée du bébé.
Déjà!
J’entends : « il vient tout seul ». « Il est caché ce bébé ».
Je ne sais pas pourquoi elle a dit ça : mais avec mon mari on se regarde en souriant, nous qui l’appelions « bébé cache-cache » pendant toute la grossesse.
David dit quelque chose, je comprends qu’il est là.
Et il est contre moi.
Je le regarde, je l’ai dans mes bras.
J’entends David, je ne le vois pas, je sais et entends qu’il pleure.
Le bébé est là, je veux lui donner tout mon amour, ce bébé que je ne connais pas et que je connais si bien.
Vite il faut pousser le placenta. Je n’ai pas envie qu’on appuie sur mon ventre. Je voudrais donner le sein, cajoler.
Ce fichu placenta ne veut pas venir. On me demande de pousser.
Le bébé commence à téter.
Toujours pas de placenta, j’ai peur car je perds du sang.
Il faut agir, on va anesthésier. L’anesthésiste arrive avec son bandana jaune. Il me propose d’endormir ou de faire une rachi. Moi j’ai envie d’une rachi mais je lui demande son avis, et il me la conseille.
Ouf. Il est si doux, le moment est préservé, le moment est magique.
J’ai juste peur de perdre mon sang. On me fait les piqûres dans le dos, ce n’est pas si désagréable. C’est très rapide.
Et là, l’anesthésiste me fait une relaxation-hypnose. Génial. C’est rassurant et doux, je pars à la mer. Pourtant je n’en ai pas besoin physiquement, je ne sens rien du tout. Mais c’est tellement rassurant qu’on s’occupe de moi. Et qu’on préserve ce moment.
J’entends pleurer doucement le bébé sur David. Ils sont en peau à peau. Je suis rassurée. Que pense David? Est-ce qu’il a peur pour moi?
Il arrive à calmer le bébé qui s’impatiente, le silence est doux : celui de leur rencontre.
C’est déjà fini, le placenta est sorti, il a été décollé. Le médecin me rassure. Et je n’ai pas une grosse perte de fer, ça ira.
Je n’ai rien senti du tout.
Je dois rester là deux heures, mais le bébé est déjà sur moi. Il tète très bien. Avec David on se sourit, on pleure. On le trouve beau. On se rencontre tous les trois.
J’ai faim. Il faut attendre.
Au bout de 2 heures, on prend le bébé pour l’examiner un tout petit peu et l’habiller. Tout est fait à côté de moi. C’est bon, c’est doux.
J’avais pris un pyjama et un body en salle de naissance, mais il fallait une turbulette et une couverture polaire, et puis des petits chaussons. Tout ça est resté dans ma valise dans la voiture!
Finalement c’est bon, on peut rentrer dans la chambre. On me met dans la chaise roulante. Je sens que je m’évanouis sur le chemin. Je rêve.
Arrivée à ma chambre je comprends que j’ai convulsé. L’équipe a eu très peur et s’est affairée. David a vu tout ça de loin dans le couloir. Il pleure à chaudes larmes.
Mais je suis revenue vite, quand elles m’ont parlé. J’étais juste en hypo, et bien fatiguée! On m’amène du jus d’orange. Il est environ 16 h.
Ça y est, notre vie à trois commence dans cette chambre. À 11 h 24, tu es né.
Pour poursuivre votre lecture, lisez Ces deux premières semaines avec toi ont été un enchantement.
Charlotte
Les opinions émises dans ce billet n’engagent que l’auteure.