La violence conjugale à la période périnatale

Grossesse, Postnatal

Bonjour tout le monde,

Vous savez que j’ai l’habitude de vous dire franchement les choses et malheureusement, même si pour la majorité des couples, l’arrivée d’un bébé est un évènement heureux et épanouissant, ce n’est pas toujours vrai pour d’autres.

La vie en couple et les dynamiques qui se développent sont souvent soumises à des défis à travers le temps mais elles ne doivent pas être régies par la notion de contrôle sur l’autre, la peur et l’inégalité.

L’arrivée d’un bébé amène un niveau de stress et d’anxiété plus élevé, face à l’inconnu, aux imprévus et aux changements nécessaire dans le quotidien. Cette transition demande à un couple de s’ajuster, de revoir son quotidien, de gérer la fatigue, de redistribuer les tâches, de communiquer autrement et ça change aussi l’intimité. Tout cela peut se faire dans l’harmonie dans le couple, dans la famille au fur et à mesure du temps. Toutefois, ces changements peuvent aussi avoir comme conséquence d’augmenter un climat de tension à la maison, surtout s’il était présent auparavant, et d’engendrer de la violence.

En résumé, la violence ne s’arrête pas après la naissance! Bien au contraire.

Transition au parentage

Même si on sait que la violence conjugale peut arriver à tout moment de la vie, la période périnatale est une période de transition très importante à considérer, de vulnérabilité importante chez certains couples.

La violence conjugale à la période périnatale est un sujet d’actualité auquel on doit s’attarder, qui préoccupe la santé publique puisque les données scientifiques tendent à montrer une augmentation significative de la violence à cette étape de vie et principalement envers les femmes.

«Ça touche très peu de nouveaux parents » me direz-vous!  Et bien, détrompez-vous! La violence conjugale touche 1 femme sur 10 à la période périnatale (source INSPQ) Vous seriez surpris de connaître les cas avoués et dénoncés alors, imaginez si on ajoutait tous les autres qui restent cachés. On sous-estime vraiment cette réalité.

Vous savez comment j’aime les parents, que j’aime les bébés et je peux vous dire qu’en services à domicile comme infirmière en pré et postnatale pendant plus de 12 années, j’ai été témoin à de très nombreuses reprises de situation de violence. Quand je parle de violence au niveau conjugal, ce n’est pas nécessairement «un coup reçu»! La violence conjugale n’est pas facile à reconnaître car elle se passe le plus souvent à l’abri des regards, insidieusement.

Définition de la violence conjugale

Il y a plusieurs façons de définir la violence conjugale et je vous rapporte celle du Ministère québécois :

« Il s’agit d’une série d’actes répétitifs marqués par l’emprise et le contrôle qui arrive entre deux personnes qui sont unies par un lien amoureux ou intense en suivant une ascension. Ces actes ne correspondent pas à une perte de contrôle mais plutôt, à un moyen choisi pour dominer l’autre, faire valoir son pouvoir sur elle. »

La violence conjugale peut prendre différents visages.

Formes de violence conjugale

Toute personne peut vivre de la violence et ce, à tous les âges de la vie. Autant à l’intérieur d’un couple en relation que lors d’une relation extra-conjugale, peut importe l’orientation sexuelle.

Nous le savons tous, ce n’est pas un sujet dont on a envie de parler sur le bord de la rue avec une ancienne amie, n’est-ce pas? C’est un sujet tabou et puisque le tout se passe le plus souvent dans l’intimité, ce n’est vraiment pas facile de le reconnaître, même si parfois l’entourage peut s’en douter.

Encore aujourd’hui, la grande majorité des victimes de violence conjugale n’osent pas dénoncer leurs agresseurs pour différentes raisons. Et des raisons, il y en a autant que d’histoires de couple.

Photo Gabriel Benois

En voici quelques-unes :

  • Elles ont souvent peur des représailles encore plus grandes par la suite,
  • Elles ont peur de se retrouver seules et sans moyen,
  • Elles ont peur de perdre leur(s) enfant(s) face aux menaces reçues,
  • Elles se sentent honteuses et coupables,
  • Elles anticipent les réactions de leur famille, entourage, à leur travail.

La violence conjugale n’est pas du tout évidente à réaliser puisqu’elle est souvent subtile, cachée et graduelle. Toutefois, la violence est toujours marquée par l’emprise et le contrôle d’une personne sur une autre. La personne violentée se trouve de plus en plus isolée, dominée.

La violence conjugale peut se présenter sous différentes formes comme par exemple, les agressions psychologiques, verbales, physiques, sexuelles ou même de l’ordre économique ou administratif. Chaque type peut se vivre indépendamment des autres ou bien se retrouver interrelié dans une même dynamique de couple.

La violence psychologique et verbale

La violence psychologique peut se traduire par des insultes qui amènent du dénigrement, de l’humiliation. On voit aussi des situations où la victime agit sous la menace, se fait harceler constamment dans sa vie au quotidien et à dans ses relations sociales.

La personne qui exerce son contrôle pourrait regarder les courriels privés de sa conjointe ou les appels téléphoniques reçus personnellement.

 

 

La violence physique

La violence physique est la principale cause des blessures durant la grossesse et elles peuvent être la répercussion d’une chute dans l’escalier, une bousculade, être agrippé/e par le bras fortement etc….

Ce type de violence touche directement l’intégrité physique de la personne. Un coup de poing, un coup de pied, des morsures, des brûlures, des menaces avec une arme blanche ou autres sont aussi des exemples concrets de la façon d’exercer un contrôle sur quelqu’un.

 

La violence économique

Photo Jay Wennington

La violence économique fait référence à un agresseur qui s’organise pour avoir le plein contrôle de tout l’aspect financier de la maisonnée, autant les décisions que l’accès. Il peut bloquer tous les comptes de banque pour sa conjointe pour qu’il lui soit impossible d’en bénéficier de façon autonome.

Seul l’agresseur aura mainmise sur le budget, sur les dépenses au quotidien et en tout temps, la victime devra passer par son agresseur pour obtenir de l’argent pour un achat.

 

La violence sexuelle

La violence sexuelle est aussi présente et peut se vivre lorsque la personne est contrainte d’avoir des rapports sexuels qu’elle ne souhaite pas. Elle peut être aussi soumise à des pratiques sexuelles non désirées sous la menace et des répercussions possibles peuvent en découler.

Il y a même des agresseurs qui empêchent la contraception pour répondre à leur désir de concevoir et ce, sans avoir le consentement de leur conjoint/e. Jeter ses pilules par exemple, empêcher d’aller à la pharmacie pour se procurer ce qu’il faut, cacher les moyens de contraception comme le diaphragme et exiger des rapports sexuels à sa demande, selon ses besoins à lui/elle.

Évolution de la violence conjugale

Comme je le disais plus tôt dans ce billet, la violence conjugale ne s’arrête pas avec l’accouchement. Même si le bébé était désiré par l’agresseur/e, un bébé change la vie au quotidien et des réactions encore plus grandes peuvent se manifester sous la frustration ressentie.

Il y a comme une espèce d’engrenage qui se met en place et forme le cycle de violence.

Ça commence avec de la tension La personne violente qui est sous tension peut réagir encore plus avec excès, devenir très en colère et menacer l’autre par un regard qui en dit long, qui fait peur. La personne qui subit cette violence se sent inquiète et elle fait attention à tout ce qu’elle dit ou fait pour ne pas provoquer encore plus de réactions de son conjoint/sa conjointe.

Ça continue avec l’agression : L’agresseur usera de contrôle au niveau des différentes sphères de violence soit, psychologiquement, physiquement, sexuellement ou économiquement. La victime sera alors triste et elle va se sentir humiliée.

Ça se poursuit avec la justification La personne violente tentera de justifier son comportement excessif et/ou son attitude disproportionnée. Elle expliquera le pourquoi de sa réaction, de ses actes et excusera finalement ce qu’elle a dit ou fait. Dans ces conditions, la victime elle, tente de comprendre la situation verbalisée par l’agresseur, et essaie de l’aider. Elle en vient même à douter de ses propres perceptions et en conclusion, elle se sent responsable des événements violents, c’est de sa faute que tout cela soit survenu.

La violence évolue encore vers la réconciliation C’est l’étape où l’agresseur demande pardon, pleure, se repentit. Il est souvent très attentionné à ce moment et il démontre de l’ouverture pour demander de l’aide, aller en thérapie, voir un professionnel pour le soutenir dans un processus de changement de comportement. Il peut même menacer de se suicider.
La victime se sent touchée et pense que la situation peut finalement changer. Elle veut lui apporter son aide, elle est disposée à lui donner une chance. Elle peut même arriver à changer, à adapter ses propres habitudes de vie pour éviter que des situations de crise se manifestent à nouveau chez son conjoint/sa conjointe.

Toute cette escalade de la violence conjugale vécue à la période périnatale engendre à coup sûr, des conséquences d’intensité variable à court, à moyen et à long terme et ce, à différents niveaux.

Conséquences de la violence conjugale

Subir de la violence de quelques formes que ce soit, peut amener des conséquences importantes chez la victime. Ces répercussions sont nombreuses et touchent autant le physique, le mental que l’émotionnel et le côté social.

Chez une femme enceinte ou une nouvelle mère, des problèmes de santé peuvent survenir et être secondaires à un climat de violence qu’elle vit. Même si plusieurs symptômes demeurent non spécifiques à la violence, ils peuvent néanmoins être associés à des problèmes de violence sous-jacents, ce qui explique encore une fois, la complexité à  reconnaître la violence.

On peut penser facilement dans ce cadre à :

  • La dépression
  • L’anxiété
  • Des problèmes de santé mentale
  • La prise d’alcool et/ou de drogue
  • La douleur chronique
  • Des troubles de sommeil

Et bien d’autres problématiques possibles.

Pour le bébé à venir, on sait qu’un climat de violence augmente le risque d’accouchement prématuré, que le bébé a plu souvent, un poids plus faible à la naissance et que son état nécessite plus de soins médicaux qu’en général suite à l’accouchement. Cela dit, on comprend rapidement que ce petit bébé arrive dans une atmosphère de violence préexistante qui l’expose directement à vivre, à son tour, cette violence comme d’être un bébé secoué par exemple. 

Le processus d’attachement du bébé à ses parents peut être compromis ainsi que le développement de sa sécurité, de sa confiance, qui pourraient le rendre vulnérable à la longue, à des troubles de comportement, des difficultés sociales, des problèmes d’apprentissage, des problèmes de santé physique et mentale et finalement, il sera plus à risque de subir directement de la violence, des agressions physiques, psychologiques et sexuelles à venir.

L’aide et les ressources disponibles

Le cycle de la violence est une roue infernale qui peut être bloquée, mais, pour cela, il faut de l’aide, et pour avoir de l’aide, il faut s’ouvrir, exprimer ce qui est vécu à quelqu’un de confiance pour garder la victime et les enfants en sécurité.

La période périnatale peut être propice pour demander de l’aide puisque la femme qui vit de la violence peut arriver à dénoncer son agresseur pour se protéger elle-même mais surtout, ses enfants.

Il y a de nombreux services pour aider lors d’une dénonciation mais aussi pour vous accompagner et contribuer à la prévention contre la violence conjugale :

Si vous êtes témoin de violence dans la famille ou au travail, suivez votre jugement, votre intuition pour éviter les situations dangereuses ou même des drames qui pourraient survenir.

Je sais que de lire tout cela n’est pas rose mais en même temps, ce billet se veut, un éclaircissement de ce que vous pouvez vivre ou ressentir autour de vous. Mettre des mots sur des situations parfois pas évidentes à réaliser. Il y a une lumière, une autre voie à prendre pour sortir de cet engrenage et vous protéger vous-même, et vos enfants, de la violence conjugale.

Avec toute ma compassion,

Pour compléter vos connaissances, lisez ces billets de blogue :

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Photo : Marie Fortier et Dre Véronique G Dorval, néonatalogiste et directrice de la clinique de suivi néonatal du CHU Sainte-Justine pour vidéo sur la prématurité (Musique) Marie : Bonjour tout le monde, Écoutez, je suis vraiment contente d’être avec vous aujourd’hui et le sujet dont on va vous entretenir dans cette vidéo concerne la prématurité. Je trouve que c’est un sujet très très important à sensibiliser et à conscientiser chez les gens qui attendent des bébés et chez ceux qui en ont eu aussi, face à tout ce qui entoure la prématurité. Et pour en parler, pour avoir un contenu des plus pertinent, qui de mieux qu’un médecin néonatalogiste qui travaille auprès des familles et des petits bébés trop pressés d’arriver. Je vous la présente à l’instant, Dre Véronique Dorval qui est une néonatalogiste ici au CHU Sainte-Justine. Elle est responsable de la clinique néonatale de suivi des petits bébés et des familles à long terme, c’est bien ça? Véronique : Oui, merci Marie, ça me fait plaisir de venir jaser avec vous d’un sujet qui me tient à coeur, la prématurité. Tous ces petits bébés et familles qui vont la vivre. Marie : Qui vont la vivre, c’est ça! Et je veux en entrée de jeu aussi dire aux parents que toutes vos questions et préoccupations que vous m’avez acheminées en lien avec la question que je vous ai demandée “Que voulez-vous savoir de la prématurité?”, Dre Dorval et moi en avons tenu compte pour vous donner toutes les réponses que vous allez retrouver à même cette vidéo ou dans les billets éducatifs qui bonifient toute l’information qui vous sera transmise via cette vidéo. Peut-être Véronique, si tu voulais commencer en nous parlant de, c’est quoi la définition de la prématurité et aussi les stats, combien de bébés naissent au Québec de façon prématurée? Véronique : Oui, la prématurité, c’est une naissance qui survient avant le terme donc, avant 37 semaine de gestation. Parce qu’un bébé de 24 semaines n’est pas du tout comparable par rapport à un bébé de 36 semaines en terme de survie, de complication, c’est aussi important de vraiment définir la prématurité selon 2 grilles, de l’âge de gestation que va présenter le petit bébé. On va parler de prématurité générale pour un bébé qui naît entre 32 et 37 semaines, de grands prématurés pour un bébé qui naît entre 28 et 32 semaines et un très grand prématuré ou extrême prématurité, les deux termes sont souvent interchangeable, pour les naissances qui ont lieu avant 28 semaines de gestation. Marie : Oui, parce qu’on est loin du 40 semaines pour la grossesse, car on compte toujours 40 semaines, on est loin longtemps! Véronique : Puis dans la littérature dernièrement, il y a un autre terme qui est apparu, qu’on appel le “late term”, la petite prématurité ou prématurité tardive qui représente les bébés nés entre 34 et 37 semaines et en terme de proportion, c’est le plus gros groupe d’enfants prématurés. Marie : Qui naissent, parfait! Même si, je le sais les parents, vous vous préparez tous à avoir un bébé à terme et en santé, donc, c’est souvent une surprise pour plusieurs, on peut pas toujours annoncer l’arrivée d’avance, c’est un choc. Véronique : En effet, c’est souvent le choc, c’est une surprise pour les parents. C’est rare qu’on peut se préparer puis même avec des facteurs de risques des fois, c’est un événement qui arrive peu souvent donc, d’être vraiment prêt, c’est difficile. Marie : Exact! On ne peut pas toujours savoir d’avance et les causes, il y a des parents qui me disent “Pourquoi elle? Pourquoi ça m’est arrivé à moi? Qu’est-ce que j’ai fait, c’est quoi les causes?” Il y en a plusieurs? Véronique : Oui, il y a beaucoup de raisons pour lesquelles le bébé peut être né prématurément. Des causes en lien avec la grossesse, ça peut-être un travail préterme, un début d’infection, un petit décollement qui irrite l’utérus, une incompétence du col, une grossesse multiple puis des fois, ce sont des raisons en lien avec la santé de maman, pour sauver le vie ou la santé de maman, des médecins peuvent décider que c’est peut-être mieux d’interrompre la grossesse et donner naissance au bébé. Marie : Plus rapidement pour le bien-être de la mère aussi. Véronique : Oui, et c’est le cas des mamans qui présentent des symptômes de prééclampsie sévère ou qui ont des maladies chroniques qui peuvent se débalancer pendant la grossesse. Puis des fois, à l’inverse, c’est vraiment sauver la vie du bébé qu’on va intervenir puisqu’il y a des chances que le bébé pourrait décéder si on poursuit la grossesse donc, comme des retards de croissance sévères ou des maladies, des malformations qui peuvent aussi décompenser chez le bébé au fur et à mesure que la grossesse progresse. Marie : Donc, par rapport à la grossesse elle-même, la mère elle-même et la santé du bébé lui-même, donc, c’est pour cela que c’est difficile qu’il y a des causes majeures qui peuvent aussi cohabiter. Véronique : Oui puis, ce qui est super important de souligner, c’est qu’en règle générale, ce n’est pas la faute des mamans. Puis, les mamans sont super bonnes pour se culpabiliser par rapport au fait qu’elles n’ont pas mené leur grossesse à terme et ça c’est super important de les rassurer par rapport à cela. Marie : C’est vrai! S’ils avaient d’autres enfants comme quelqu’un qui a déjà accouché d’un bébé prématuré, beaucoup de parents me demandent, “Est-ce que je suis à risque d’accoucher à nouveau prématurément si j’ai d’autres enfants?” Véronique : Oui, en effet, c’est vrai que le risque est un petit plus, dans la littérature, on parle d’environ 15 % mais il y a beaucoup de choses qui entrent en jeu pour faire soit augmenter ou diminuer ces risques selon les facteurs, les raisons. Marie : Oui, parce que souvent, je disais à des parents, une maman qui avait une incompétence du col, que son col ouvrait très rapidement, elle va avoir le même col la prochaine fois. Si on a pas d’intervention posée vis-à-vis celui-ci, y’a bien des chances que cela arrive. Véronique : Quand on le sait, on peut vraiment prendre en charge ces mamans précocement. Dans le cas d’une incompétence du col, on peut offrir un cerclage précoce puis dans les cas de prééclampsie, de retard de croissance, parois, il y a des thérapies qui peuvent être offertes très tôt dans la grossesse pour minimiser, prévenir. Marie : Quand on parle de cerclage du col, c’est vraiment que vous attachez le col. Véronique : Oui, pas moi, mais les obstétriciens, c’est pas moi. Marie : C’est vrai, moi je dis vous mais elle s’occupe des petits bébés et il y a d’autres spécialistes. Si le col s’ouvre trop facilement, en le rattachant, comme ça, ils vont couper le fil à la fin de la grossesse pour permettre la grossesse la plus longue possible, plus vers le terme. C’est l’appellation sur laquelle je voulais revenir. Toi Véronique, tu es un médecin qui accueille des petits bébés en néonatalogie. Quand il y a une maman qui est en travail et on sait qu’elle va accoucher et que ça va être assez prématuré, comment intervenez-vous concrètement? Véronique : Dans un monde idéal, on a la chance de rencontrer la famille avec une consultation anténatale. Donc, en général c’est l’obstétricien qui est inquiet, s’il y a une possibilité de voir la maman qui va donner naissance de façon prématurée. Ils vont nous demander pour qu’on puisse rencontrer et préparer les familles, répondre à leurs questions, puis, nous on a aussi comme but de diminuer leur anxiété, les informer puis aussi, leur donner un peu plus de contrôle parce qu’ils sont vraiment dans une situation de perte de contrôle. Marie : Et même faire visiter la néonatalogie parfois? Véronique : En effet, quand la condition de la mère le permet, une petite visite. Marie : Parce que la néonatalogie, ce sont les soins intensifs des petits bébés, si le terme est plus confus pour vous. C’est très technologique, plein d’appareillage, c’est de la haute technologie, ça peut être une pression de plus, donc, le fait de visiter avant c’est une préparation dans le meilleur des mondes en tout cas. Véronique : Car c’est vrai que ce n’est pas facile. Ça peut-être très très intimidant toute la technologie qui entoure l’enfant. Pour n’importe qui qui met les pieds dedans, pas juste pour un parent mais déjà, un parent qui a un enfant malade, c’est beaucoup, c’est très impressionnant. Marie : C’est quelque chose! Et même si vous avez accouché de d’autres enfants, et que vous vivez une situation comme ça, pour un 2e ou 3e, on est surpris pareil. Il y a un impact, il faut le dire, un impact sur toute la famille d’avoir un bébé prématuré, peux-tu nous en parler? Véronique : En effet, il y a beaucoup d’impacts à tous les niveaux. Si on parle premièrement pour le petit bébé, c’est clair que pour la majorité des prématurés, la petite prématurité, le plus gros impact c’est qu’il ne pourra pas partir avec sa maman quand la maman est prête à partir et qu’il va devoir rester sous nos soins dans un incubateur, sous les moniteurs pour la surveillance de ses signes vitaux, plusieurs petites piqûres, parfois un soluté pour surveiller la glycémie, la jaunisse, les échanges gazeux. C’est beaucoup de petits soins qui sont peut-être inconfortables aussi malgré qu’on essaie de minimiser la douleur puis ensuite, il y a l’alimentation qui se fait différemment pour le bébé. Marie : Avec des gavages parfois, avec un tube dans le nez ou la bouche. Véronique : Oui, pour porter directement le lait de maman dans l’estomac en attendant qu’il soit mature assez pour apprendre à le faire lui-même. Ça c’est pour la petite prématurité. Plus on est immature, ça peut souvent impliquer des soins intensifs de haut niveau, plusieurs semaines, voir plusieurs mois. Et ça aussi ça peut laisser des traces sur la santé de l’enfant sur le long terme puis avoir un impact sur son développement. Marie : Et l’impact, on dit qu’il est à plusieurs niveaux pour le bébé en soi que tu as bien décrit Véronique. Il y a aussi le couple qui est souvent fragilisé et le reste de la famille. Si vous aviez d’autres enfants, tout le monde devient un peu désorganisé. Véronique : Ha oui! En effet, les vagues se répandent aussi rapidement pour la famille. Et les impacts les plus concrets, c’est sur le plan organisationnel. Tout d’un coup les familles doivent se mobiliser, s’organiser, une naissance à terme vient chambouler tous les aspects de la vie. Donc quand arrive la prématurité, souvent c’est vécu en plus dans le stress, la peur, l’anxiété, l’inconnu, tout ça n’est pas facile pour les parents. S’il y a la fratrie, c’est difficile de comprendre tous les bouleversements dans la vie des parents et dans leur propre routine surtout s’ils n’ont pas eu la chance de rencontrer le petit bébé. Marie : C’est vrai, pourquoi il revient pas à la maison? Pourquoi maman est toujours à l’hôpital? Véronique : C’est des questions aussi que la famille élargie peut avoir, surtout si les parents aiment garder une petite distance pour peut-être protéger la maman, donc, cela a définitivement des impacts sur la famille et ensuite pour le couple. C’est clair que s’il y avait des tensions, des stress, une naissance prématurée peut les faire remonter à la surface mais aussi, s’il y a de bons mécanismes en place, on voit beaucoup de soutien, d’entraide, de résilience. Puis, ça peut-être beau de voir les parents mais je ne pense pas qu’il y a vraiment une différence dans les émotions qui sont vécues entre les hommes et les femmes. Marie : Ha, ça c’était une question. Véronique : C’est plus l’expression de ces émotions-là. Je pense que ça va varier beaucoup selon la personne, les bagages, les antécédents, les bagages culturels aussi. Marie : Puis Véronique, il y avait des mamans aussi qui m’avaient questionnée en me disant “S’il naît prématurément, je ne pourrai pas l’allaiter?” Je trouve que c’est une bonne question à te poser parce qu’elles se demandent souvent à partir de quel âge on peut mettre un bébé au sein par exemple? Véronique : Oui en effet, c’est clair que nous on encourage énormément l’allaitement et une des premières choses qu’on leur dit c’est que c’est plus que possible d’allaiter oui oui, c’est très encouragé. C’est le meilleur lait qu’il n’y a pas pour soutenir la croissance et le développement et vraiment la santé du bébé, mais ça va se faire différemment. On ne pourra pas mettre le bébé tout de suite au sein. On va plutôt demander aux mamans de commencer à tirer leur lait, travailler leur production pour pouvoir ensuite donner ce lait au bébé via une façon inactive comme vous le disiez par gavage. Et autour de 33-34 semaines, c'est là que le bébé a la maturité pour bien coordonner téter, respirer et... Marie : Avaler. C’est dur de faire ces trois choses là en même temps. Il y en a qui tètent fort fort et ne respirent plus et ils sont tout bleus et ils respirent. Et ils sont drôles. Véronique : Nous on prend ça pour acquis, mais c'est complexe sur le plan neurologique. C’est tout un apprentissage pour les bébés autour de 33-34 semaines, c’est là qu’on peut entamer cet apprentissage qui va se faire sur plusieurs semaines aussi. Marie : Puis, si les mamans, il y en a qui me disaient, “Moi j’ai pas été capable d’allaiter, que le lait ne venait pas, j’étais tellement stressée et je ne sais pas pourquoi j’ai pas produit et j’étais tellement triste!” Mais, on a des alternatives maintenant. Véronique : Bien oui, définitivement. Au début, on a aussi des banques de lait de Héma-Québec qui peuvent nous aider pour certains bébés surtout les plus immatures. Marie : Les plus immature ça c’est plus en bas de 32 semaines? Véronique : Les critères vont varier mais généralement, aux alentours de 32 semaines et moins. Marie : Du lait humain, du lait maternel en banque de lait. Véronique : Des mamans qui ont donné leur lait pour pouvoir nourrir des petits bébés. Ça nous permet beaucoup d’éviter des complications en lien avec la formule. Puis aussi, on a dans les années récentes, beaucoup d’unités néonatales qui se sont outillées de conseillères en allaitement pour vraiment aider les mamans à entamer leur production puis la soutenir. Des fois, il y en a même qui ont la chance de rencontrer les mamans avant la naissance. Marie : C’est vrai, puis au besoin, il y a des solutions, ça peut aider. Puis, voyez les parents, on a parlé jusqu’à date des définitions, des stats, l’impact, la surprise, le choc, tout cela et au-delà de tout cela, il y a du soutien qui est donné à ces familles-là. Véronique : Oui, très rapidement, pareil, on essaie de les mettre en lien avec des organismes. Marie : Des associations. Véronique : Exactement, je pense qu’on s’est beaucoup amélioré dans les dernières années. On essaie vraiment d’encadrer, de les aider à prendre leur place, de leur expliquer ce qui se passe avec leur bébé. Nos infirmières sont vraiment exceptionnelles pour guider les parents à travers cette épreuve-là et les aider à apprivoiser tous les soins. Marie : Qui vont autour de cela. Véronique : Exactement, on est toutes très sensibles à ce que vivent les parents dans l’immédiat donc, tout le monde a un mandat d’essayer de soutenir la famille à travers toute l’expérience. Marie : Autant psychologique qu’organisationnelle. Véronique : Bien sûr, on a des travailleuses sociales et des psychologues aussi pour des parents qui vivent plus de détresse. On a toujours des ressources disponibles pour nous aider et les aider. Marie : Véronique disait tantôt, il y en a qui sont des très grands prématurés qui sont longtemps à l’hôpital. Mais il y a une sortie éventuelle, il y a un congé, il y a un retour à la maison qu’il faut préparer aussi. Véronique : Oui en effet, on sait que la transition va être difficile et on essaie de préparer les parents dès le jour 1. Encore là, c’est un travail exceptionnel de nos infirmières qui vont vraiment soutenir les parents et les habiletés, les faire participer dans les soins du bébé. Marie : Dès l’hôpital, dès la néonatalogie, donner des petits soins de bain, ou changer des couches. Véronique : Exactement, c’est super. ils vont tenir un journal de tous les apprentissages que les parents devraient acquérir pour vraiment maîtriser. Je crois que ça bâtit beaucoup leur confiance quand on a bien maîtrisé tous les soins, on se sent plus à l’aise d’accueillir son petit bébé à la maison Marie : Et le fait que vous l’ayez fait accompagné d’un intervenant à côté de vous a fait toute la différence aussi. C’est pas comme quand on vous donne votre congé après 3 jours, on n’a pas eu quelqu’un longtemps pour vous montrer tous ces soins là. C’est un moment qui est précieux quant à acquérir et la connaissance et l’habileté aussi avec votre petit bébé parce que vous allez rester les parents de cet enfant-là! Véronique : Les parents maintenant ont un plus grand accès à leur bébé que dans les décennies précédentes. On essaie vraiment de favoriser la cohabitation. Souvent, dans plusieurs unités, il y a des petits lits pour les parents pour leur permettre de rester le plus longtemps possible. C’est de les garder présents au chevet, leur donner une voix lors des tournées médicales, stimuler leurs questionnements par rapport à leur enfant, on les encourage par rapport à ça. Marie : Quand il y a le congé de l’hôpital, on les réfère au CLSC? Aux ressources de leur communauté? Vu qu’ils ne viennent pas tous de la région ici. Vous essayez de compenser par les autres services du réseau? Véronique : Oui, c’est clair que quand on est de petite prématurité, on va contacter le CLSC parfois au besoin, une nutritionniste aussi pour des suivis nutritionnels parfois. Il y a des bébé qui n’ont pas nécessairement besoin. On va les aider à trouver un pédiatre ou un médecin de famille pour assurer le suivi. Faire un petit résumé de dossier à leur remettre pour la continuité des soins pour qu’ils puissent faire. Pour les plus grands prématurés, les moins de 28 semaines, il y a plusieurs cliniques de suivi néonatal à travers le Québec qui vont assurer leur suivi médical puis neurodéveloppemental. C’est une grosse équipe : médecin, infirmière et des spécialistes en réadaptation. Marie : C’est plus à long terme! Il faut le dire, tantôt on parlait de l’impact mais il y a aussi des impacts à long terme chez les enfants? Véronique : Oui en effet, c’est clair que pour le long terme, la majorité des prématurés qui sont nés entre 32-37 semaines vont relativement bien. C’est beaucoup de soins au début puis éventuellement, les enfants demeurent avec une petite vulnérabilité pour les infections respiratoires. Les premières années, il faut les protéger et les parents sont souvent très anxieux par rapport à ça. Les extrêmes prématurés sont plus à risque d’avoir des séquelles sur le long terme de leur santé générale avec les petits poumons qui sont encore immatures et qui peuvent nécessiter de l’oxygène. Leur développement, des problèmes avec l’alimentation, tout cela peut persister, puis bien sûr des difficultés avec leur développement qui peuvent être en lien avec des séquelles plus permanentes comme la cécité, la surdité, la paralysie cérébrale et là, on parle d’un petit pourcentage, d’un petit nombre de patients. Marie : C’est bien moins qu’avant! Véronique : Ha oui! Définitivement! Ce qu’on voit le plus fréquemment, ce sont des retards de développement peut-être associés avec des déformations musculo-squelettiques. Des débalancements dans les forces musculaires qui peuvent engendrer des retards moteurs précoces et un retard dans une sphère peut engendrer un retard dans une autre. Mais heureusement, les enfants prématurés répondent très bien aux interventions de réadaptations précoces et de stimulation. Marie : C’est pour cela qu’on n’attend pas, on intervient rapidement. Véronique : En effet, même ces services de réadaptation peuvent s’étendre au-delà de l’âge scolaire. Parfois des enfants peuvent avoir des gros besoins mais éventuellement une grosse partie du développement qui va se normaliser. Marie : On ne rentre pas dans tous les détails. Il y a des parents qui se demandaient, “Mon bébé est né à 32 semaines et ne marche pas à 1 an.” Et là, je leur disais, mais oui, il est né avant alors c’est normal qu’à 12 mois il y en a qui ne marchent pas parce qu’il y a l’âge chronologique et l’âge biologique. Véronique : En effet, il faut toujours tenir compte de l’âge corrigé du bébé. À 24 semaines, rendu à 6 mois d’âge réel, pour nous il n’a pas 6 mois, il a juste 2 mois si on tient compte de sa prématurité. Si on corrige pour la prématurité, il a juste 2 mois et ça c’est important parce qu’on doit voir tout ce qu’il est de développement et qu’on évalue le développement. Marie : Il faut suivre en conséquence. Et c’est pour ça que les parents qui comparent avec leurs amis, avec les enfants de la famille, ils se trouvent déstabilisés des fois en disant : “Pourquoi le mien ne fait pas ça?” Mais n’oublie pas qu’il est né avant, il faut y donner une petite chance. Véronique : Souvent, on doit le rappeler aux parents. Ils oublient, ils demandent “Est-ce que je commence les céréales?” Non non non, il a juste 2 mois. Marie : C’est vrai, c’est vrai, ha, c’est chouette! C’est tout un monde la prématurité. Les parents c’est certain, je pense qu’on a dressé quand même un portrait assez global de la situation. Je voulais vous remercier, je ne sais pas quelle conclusion aimeriez-vous partager aux parents qui vous écoutent? Véronique : À tous ceux qui écoutent, un des messages clés que j’aimerais transmettre, même si la prématurité ça peut être éprouvant pour les familles puis même si les petits bébés prématurés nécessitent beaucoup de soins dans les premières années de vie, beaucoup de services de réadaptation, ça en vaut plus que la peine! Ha oui! Vraiment avec le recul des dernières années, on sait que les enfants prématurés avec ou sans séquelles, ont toutes les chances du monde d’avoir une très belle qualité de vie et aussi de devenir des membres productifs de la société. Donc, pour moi le message est oui, les prématurés vont bien! La très grosse majorité va très bien puis c’est super important je pense de transmettre cette réalité parce que ce n’est pas toujours le message qui a été véhiculé dans le passé par les médias. Marie : Je pense que notre bon vouloir de sensibiliser les gens, Véronique, je pense que cela a bien valu la peine. Mille mercis à toi d’avoir été là pour transmettre ton expertise. Véronique : Ça me fait plaisir, merci à toi. Marie : Ton implication et ton amour des bébés qu’on partage. Bonjour tout le monde et n’oubliez pas, je vous attends sur mon site mariefortier.com pour tout le reste des détails sur les billets éducatifs. À bientôt, au revoir.

La prématurité

Dans cette vidéo, je suis accompagnée de Dre Véronique G Dorval, néonatalogiste et directrice de la clinique de suivi néonatal

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