La régression du sommeil

Accouchement/vie avec bébé, Postnatal

Vous avez probablement déjà consulté mon billet éducatif concernant le sommeil des nourrissons pour mieux comprendre, globalement, sa maturité développementale à ce niveau. Si ce n’est déjà fait, c’est par ici!

Plusieurs d’entre vous font soudainement face à des réveils brutaux de leur petit et vous vous demandez ce qui lui arrive tout d’un coup?!
Mieux comprendre, c’est aussi mieux intervenir pour répondre à son besoin!

Qu’est-ce qu’on entend par régression du sommeil?

Pour débuter, précisons d’emblée que les régressions de sommeil sont tout à fait normales à travers le temps pour un jeune enfant.

La définition d’une régression du sommeil pourrait se traduire sommairement par une rechute vers un sommeil perturbé, interrompu brutalement par des éveils fréquents chez un jeune enfant qui dormait bien auparavant. Même les siestes peuvent devenir infernales au quotidien.

Certains auteurs décrivent la régression du sommeil comme étant une dégradation soudaine du sommeil, une résistance inhabituelle de l’enfant à se coucher et dormir, et plus profondément encore, une désorganisation du cerveau du bébé qui se produit juste avant une accélération de son développement psychomoteur (ex: se traîner ou marcher) ou cognitif (ex: le langage).

Comme le résume si bien le pédiatre Brazelton:

Un enfant peut régresser dans une sphère de ses activités temporairement pour mieux avancer dans une autre, et ce, le temps qu’il faudra pour assimiler les nouvelles compétences.

On peut voir ces périodes survenir à différents moments du développement d’un enfant, entre autres, lorsqu’il y a des accélérations importantes de la maturation neurologique qui augmentent l’exigence cérébrale. Ces transformations apportent son lot de changements du comportement pouvant se manifester entre autres, par des pleurs, des éveils plus fréquents et par des demandes plus pressantes qu’à l’habitude de la part de votre petit à votre égard.

À quoi les régressions de sommeil sont-elles attribuables?

Il y a plusieurs causes pouvant être identifiées comme étant des facteurs déclencheurs ou perturbateurs du sommeil de l’enfant à la base d’une régression du sommeil. Ces causes peuvent toucher à la fois des composantes reliées à la maturation cérébrale, à l’étape de développement, à certaines transitions vécues et aussi, à certaines conditions de santé.

La maturation cérébrale

Nous savons que le jeune bébé n’a pas de cycle de sommeil régulier avant l’âge de 4 mois et l’apprentissage du sommeil se fait au fil du temps et de sa maturation. Dans les premiers mois de vie, l’immaturité neurologique et les maux physiques sont des causes évidentes qui influencent le sommeil des jeunes bébés.

On peut constater, même avant 4 mois, qu’il y a des périodes plus propices à des changements dans les habitudes de sommeil de l’enfant. On peut penser par exemple à un bébé âgé entre 6 et 8 semaines, où l’on peut remarquer très fréquemment une phase où il y a des perturbations évidentes du sommeil. On remarque plus de pleurs et un plus grand besoin chez ce dernier d’être porté et bercé, et ce, durant une bonne semaine. Les parents se retrouvent à ce moment très intrigués par la situation, car ils ne reconnaissent pas leur bébé habituel, qui dormait si bien!

La communauté savante a étudié cette étape plus particulière pour découvrir du même coup qu’un grand développement neurologique se produisait au même moment. C’est donc dire qu’une activité neurologique augmentée peut occasionner des changements, des perturbations dans le quotidien habituel d’un enfant en termes de réactions, d’habitudes et de comportements et que tout cela est parfaitement normal au final. Qu’on se le dise, le sommeil d’un petit est rythmé par sa biologie.

Attention également aux parents de ne pas confondre un sommeil un peu agité ou bruyant à une régression de sommeil. Certaines étapes du cycle du sommeil chez l’enfant peuvent engendrer un sommeil plus léger, avec ou sans cri, chignage ou pleurs, et ce, même en continuant de dormir.

La régulation du sommeil s’acquiert avec le temps et on ne peut pas précipiter cette étape chez un enfant. Chaque enfant est différent et a son propre rythme de développement. Il va s’en dire toutefois que la majorité des parents verront le sommeil de leur enfant devenir de plus en plus stable et prévisible entre 4 et 6 mois de vie pour un bébé né à terme et en bonne santé. Mais, c’est seulement à 3 ans qu’un enfant aura un cycle de sommeil similaire à celui de l’adulte.

Souvent autour de 4 mois, les parents verront leur bébé se réveiller davantage la nuit, parfois même chaque 2 heures et ne comprendront pas pourquoi. En fait, la régulation du sommeil se fait de mieux en mieux pour lui à travers une évolution normale. Cette étape l’amène à rechercher une manière de s’endormir, en attachant les cycles de sommeil entre eux, et d’allonger le temps de sommeil. C’est pourquoi si votre bébé est habitué à être endormi dans vos bras en se faisant bercer, il voudra reproduire le tout pour retrouver son sommeil entre deux cycles de sommeil, même chose si vous vous dépêchez de lui remettre sa suce aux moindres petits cris de sa part ou lui donner à boire à chaque éveil. Ainsi, on se retrouvera dans un cercle vicieux sans fin où chaque membre de la famille se retrouve fatigué, exténué et à bout de souffle.

L’étape du développement

Avec la maturation et le développement neurologique du bébé vient l’apprentissage de toutes sortes. La première année de vie est sans aucun doute une phase de vie de grande croissance et de développement et ce, à vitesse grand V. Une chose après l’autre, il apprendra à se tourner, à manger, à boire au verre, à rire, à se traîner au sol, à babiller, à prendre des objets, à se lever puis à marcher et tellement d’autres choses, autant physique, émotionnelle que cognitive.

En ce sens, un enfant qui apprend à se tourner du dos au ventre, mais pas l’inverse, sera porté à se réveiller plus souvent pour demander votre aide pour reprendre une position plus confortable. Cela fait partie de son développement. Le parent pourra dès lors, jouer le jour avec son enfant en le stimulant directement à ce niveau, afin qu’il puisse effectuer de son propre gré, la roulade des deux côtés quand bon lui semble.

Il y a des périodes du développement où l’on peut identifier très facilement les causes des perturbations du sommeil d’un enfant, comme le fait de se développer au niveau moteur, d’être plus curieux face à son environnement, d’être plus sensible aux bruits environnants ou bien, prendre plus conscience d’être séparé de sa mère et de son père et vouloir les retrouver.

À ces étapes, on peut aussi ajouter des périodes plus spécifiques très particulières comme:

  • Autour de 8-10 mois avec l’anxiété de séparation,
  • À partir de 18 mois jusqu’à 24 mois lors de la phase d’opposition,
  • Entre 18 mois et 6 ans, concernant les terreurs nocturnes, les cauchemars et la peur du noir.

Tout cela est possible et reste passager avec une intervention parentale sécurisante, cohérente et bienveillante.

Les transitions dans la vie

Les enfants peuvent, tout comme nous, vivre certaines transitions dans leur vie qui amènent aussi son lot de modifications de leur sommeil.

On peut penser à:

Ces changements dans le quotidien demandent une adaptation de toute la famille, y compris du jeune enfant. Le retour aux routines habituelles et aux rituels connus de l’enfant aideront certes à retrouver plus rapidement l’harmonie au quotidien lors des nuits.

Les conditions de santé

La condition de santé d’un enfant est primordiale à considérer lorsqu’on évalue son sommeil. Il va sans dire qu’il y a des circonstances, des problèmes et des anomalies neurologiques qui peuvent être à l’origine d’un trouble dans la régulation du sommeil d’un enfant. C’est pourquoi il faut avoir des attentes réalistes parfois avec des enfants connus pour avoir des atteintes cérébrales, puisque celles-ci peuvent venir influencer et ralentir l’apprentissage du sommeil qui se trouve très souvent plus fragile et perturbé.

Il ne faut toutefois pas confondre de possibles problèmes neurologiques avec des éveils nocturnes plus fréquents, qui pourraient être en lien davantage avec une poussée dentaire par exemple ou bien une otite, un gros rhume ou de la congestion. Oui, ces conditions viennent perturber le sommeil par les inconforts qu’elles produisent, mais de façon transitoire et de courtes durées. Le sommeil de l’enfant devient plus léger, moins régulier, moins récupérateur et plus agité, mais le tout se résout avec la guérison de l’état de santé et la disparition des symptômes désagréables.

L’apport du parent est toujours essentiel pour répondre aux besoins de soins de l’enfant et ensuite, revenir aux routines habituelles afin de retrouver l’équilibre dans le quotidien comme avant l’épisode vécu.

La durée d’une régression de sommeil

Il n’y a pas de durée déterminée d’une régression de sommeil. Tout dépend du moment qu’il s’agit et de son origine possible.

Plusieurs parents ne comptent que quelques jours pour voir la situation se rétablir, tandis que d’autres se verront contraints à subir le changement pour quelques semaines, allant de 2 à 6 semaines parfois.

Malheureusement, pour certaines familles, une régression de sommeil chez un enfant sera à l’origine d’une nouvelle habitude ou d’une nouvelle routine de vie, qui mettra à l’épreuve le vécu de toute la famille. Pour prévenir le tout, le parent est responsable d’apprendre et d’accompagner son enfant à développer de bonnes habitudes de sommeil. Pour y arriver,  rien de mieux que de mettre en place une bonne routine du dodo dès 4 mois, qui répète les étapes de façon cohérente, adaptée et bienveillante pour faire face aux régressions du sommeil qui se présenteront sur notre chemin, et ce, au grand bénéfice de tous.

Je vous souhaite à tous un sommeil calme et récupérateur…du moins, pour la plupart du temps!

Marie Fortier
La spécialiste des bébés

Découvrir nos vidéos

Adhérez à forfait mensuel ou trimestriel dès maintenant afin d’accéder aux vidéos complètes forfait mensuel ou trimestriel Voir toutes les vidéo

Allaitement : Être en relation avec mon bébé

Allaitement : Être en relation avec mon bébé

Comment se déroulent les premiers moments avec bébé? Comment le corps se prépare‑t‑il à l’allaitement? Marie aborde le sujet et
Photo : Marie Fortier et Dre Véronique G Dorval, néonatalogiste et directrice de la clinique de suivi néonatal du CHU Sainte-Justine pour vidéo sur la prématurité (Musique) Marie : Bonjour tout le monde, Écoutez, je suis vraiment contente d’être avec vous aujourd’hui et le sujet dont on va vous entretenir dans cette vidéo concerne la prématurité. Je trouve que c’est un sujet très très important à sensibiliser et à conscientiser chez les gens qui attendent des bébés et chez ceux qui en ont eu aussi, face à tout ce qui entoure la prématurité. Et pour en parler, pour avoir un contenu des plus pertinent, qui de mieux qu’un médecin néonatalogiste qui travaille auprès des familles et des petits bébés trop pressés d’arriver. Je vous la présente à l’instant, Dre Véronique Dorval qui est une néonatalogiste ici au CHU Sainte-Justine. Elle est responsable de la clinique néonatale de suivi des petits bébés et des familles à long terme, c’est bien ça? Véronique : Oui, merci Marie, ça me fait plaisir de venir jaser avec vous d’un sujet qui me tient à coeur, la prématurité. Tous ces petits bébés et familles qui vont la vivre. Marie : Qui vont la vivre, c’est ça! Et je veux en entrée de jeu aussi dire aux parents que toutes vos questions et préoccupations que vous m’avez acheminées en lien avec la question que je vous ai demandée “Que voulez-vous savoir de la prématurité?”, Dre Dorval et moi en avons tenu compte pour vous donner toutes les réponses que vous allez retrouver à même cette vidéo ou dans les billets éducatifs qui bonifient toute l’information qui vous sera transmise via cette vidéo. Peut-être Véronique, si tu voulais commencer en nous parlant de, c’est quoi la définition de la prématurité et aussi les stats, combien de bébés naissent au Québec de façon prématurée? Véronique : Oui, la prématurité, c’est une naissance qui survient avant le terme donc, avant 37 semaine de gestation. Parce qu’un bébé de 24 semaines n’est pas du tout comparable par rapport à un bébé de 36 semaines en terme de survie, de complication, c’est aussi important de vraiment définir la prématurité selon 2 grilles, de l’âge de gestation que va présenter le petit bébé. On va parler de prématurité générale pour un bébé qui naît entre 32 et 37 semaines, de grands prématurés pour un bébé qui naît entre 28 et 32 semaines et un très grand prématuré ou extrême prématurité, les deux termes sont souvent interchangeable, pour les naissances qui ont lieu avant 28 semaines de gestation. Marie : Oui, parce qu’on est loin du 40 semaines pour la grossesse, car on compte toujours 40 semaines, on est loin longtemps! Véronique : Puis dans la littérature dernièrement, il y a un autre terme qui est apparu, qu’on appel le “late term”, la petite prématurité ou prématurité tardive qui représente les bébés nés entre 34 et 37 semaines et en terme de proportion, c’est le plus gros groupe d’enfants prématurés. Marie : Qui naissent, parfait! Même si, je le sais les parents, vous vous préparez tous à avoir un bébé à terme et en santé, donc, c’est souvent une surprise pour plusieurs, on peut pas toujours annoncer l’arrivée d’avance, c’est un choc. Véronique : En effet, c’est souvent le choc, c’est une surprise pour les parents. C’est rare qu’on peut se préparer puis même avec des facteurs de risques des fois, c’est un événement qui arrive peu souvent donc, d’être vraiment prêt, c’est difficile. Marie : Exact! On ne peut pas toujours savoir d’avance et les causes, il y a des parents qui me disent “Pourquoi elle? Pourquoi ça m’est arrivé à moi? Qu’est-ce que j’ai fait, c’est quoi les causes?” Il y en a plusieurs? Véronique : Oui, il y a beaucoup de raisons pour lesquelles le bébé peut être né prématurément. Des causes en lien avec la grossesse, ça peut-être un travail préterme, un début d’infection, un petit décollement qui irrite l’utérus, une incompétence du col, une grossesse multiple puis des fois, ce sont des raisons en lien avec la santé de maman, pour sauver le vie ou la santé de maman, des médecins peuvent décider que c’est peut-être mieux d’interrompre la grossesse et donner naissance au bébé. Marie : Plus rapidement pour le bien-être de la mère aussi. Véronique : Oui, et c’est le cas des mamans qui présentent des symptômes de prééclampsie sévère ou qui ont des maladies chroniques qui peuvent se débalancer pendant la grossesse. Puis des fois, à l’inverse, c’est vraiment sauver la vie du bébé qu’on va intervenir puisqu’il y a des chances que le bébé pourrait décéder si on poursuit la grossesse donc, comme des retards de croissance sévères ou des maladies, des malformations qui peuvent aussi décompenser chez le bébé au fur et à mesure que la grossesse progresse. Marie : Donc, par rapport à la grossesse elle-même, la mère elle-même et la santé du bébé lui-même, donc, c’est pour cela que c’est difficile qu’il y a des causes majeures qui peuvent aussi cohabiter. Véronique : Oui puis, ce qui est super important de souligner, c’est qu’en règle générale, ce n’est pas la faute des mamans. Puis, les mamans sont super bonnes pour se culpabiliser par rapport au fait qu’elles n’ont pas mené leur grossesse à terme et ça c’est super important de les rassurer par rapport à cela. Marie : C’est vrai! S’ils avaient d’autres enfants comme quelqu’un qui a déjà accouché d’un bébé prématuré, beaucoup de parents me demandent, “Est-ce que je suis à risque d’accoucher à nouveau prématurément si j’ai d’autres enfants?” Véronique : Oui, en effet, c’est vrai que le risque est un petit plus, dans la littérature, on parle d’environ 15 % mais il y a beaucoup de choses qui entrent en jeu pour faire soit augmenter ou diminuer ces risques selon les facteurs, les raisons. Marie : Oui, parce que souvent, je disais à des parents, une maman qui avait une incompétence du col, que son col ouvrait très rapidement, elle va avoir le même col la prochaine fois. Si on a pas d’intervention posée vis-à-vis celui-ci, y’a bien des chances que cela arrive. Véronique : Quand on le sait, on peut vraiment prendre en charge ces mamans précocement. Dans le cas d’une incompétence du col, on peut offrir un cerclage précoce puis dans les cas de prééclampsie, de retard de croissance, parois, il y a des thérapies qui peuvent être offertes très tôt dans la grossesse pour minimiser, prévenir. Marie : Quand on parle de cerclage du col, c’est vraiment que vous attachez le col. Véronique : Oui, pas moi, mais les obstétriciens, c’est pas moi. Marie : C’est vrai, moi je dis vous mais elle s’occupe des petits bébés et il y a d’autres spécialistes. Si le col s’ouvre trop facilement, en le rattachant, comme ça, ils vont couper le fil à la fin de la grossesse pour permettre la grossesse la plus longue possible, plus vers le terme. C’est l’appellation sur laquelle je voulais revenir. Toi Véronique, tu es un médecin qui accueille des petits bébés en néonatalogie. Quand il y a une maman qui est en travail et on sait qu’elle va accoucher et que ça va être assez prématuré, comment intervenez-vous concrètement? Véronique : Dans un monde idéal, on a la chance de rencontrer la famille avec une consultation anténatale. Donc, en général c’est l’obstétricien qui est inquiet, s’il y a une possibilité de voir la maman qui va donner naissance de façon prématurée. Ils vont nous demander pour qu’on puisse rencontrer et préparer les familles, répondre à leurs questions, puis, nous on a aussi comme but de diminuer leur anxiété, les informer puis aussi, leur donner un peu plus de contrôle parce qu’ils sont vraiment dans une situation de perte de contrôle. Marie : Et même faire visiter la néonatalogie parfois? Véronique : En effet, quand la condition de la mère le permet, une petite visite. Marie : Parce que la néonatalogie, ce sont les soins intensifs des petits bébés, si le terme est plus confus pour vous. C’est très technologique, plein d’appareillage, c’est de la haute technologie, ça peut être une pression de plus, donc, le fait de visiter avant c’est une préparation dans le meilleur des mondes en tout cas. Véronique : Car c’est vrai que ce n’est pas facile. Ça peut-être très très intimidant toute la technologie qui entoure l’enfant. Pour n’importe qui qui met les pieds dedans, pas juste pour un parent mais déjà, un parent qui a un enfant malade, c’est beaucoup, c’est très impressionnant. Marie : C’est quelque chose! Et même si vous avez accouché de d’autres enfants, et que vous vivez une situation comme ça, pour un 2e ou 3e, on est surpris pareil. Il y a un impact, il faut le dire, un impact sur toute la famille d’avoir un bébé prématuré, peux-tu nous en parler? Véronique : En effet, il y a beaucoup d’impacts à tous les niveaux. Si on parle premièrement pour le petit bébé, c’est clair que pour la majorité des prématurés, la petite prématurité, le plus gros impact c’est qu’il ne pourra pas partir avec sa maman quand la maman est prête à partir et qu’il va devoir rester sous nos soins dans un incubateur, sous les moniteurs pour la surveillance de ses signes vitaux, plusieurs petites piqûres, parfois un soluté pour surveiller la glycémie, la jaunisse, les échanges gazeux. C’est beaucoup de petits soins qui sont peut-être inconfortables aussi malgré qu’on essaie de minimiser la douleur puis ensuite, il y a l’alimentation qui se fait différemment pour le bébé. Marie : Avec des gavages parfois, avec un tube dans le nez ou la bouche. Véronique : Oui, pour porter directement le lait de maman dans l’estomac en attendant qu’il soit mature assez pour apprendre à le faire lui-même. Ça c’est pour la petite prématurité. Plus on est immature, ça peut souvent impliquer des soins intensifs de haut niveau, plusieurs semaines, voir plusieurs mois. Et ça aussi ça peut laisser des traces sur la santé de l’enfant sur le long terme puis avoir un impact sur son développement. Marie : Et l’impact, on dit qu’il est à plusieurs niveaux pour le bébé en soi que tu as bien décrit Véronique. Il y a aussi le couple qui est souvent fragilisé et le reste de la famille. Si vous aviez d’autres enfants, tout le monde devient un peu désorganisé. Véronique : Ha oui! En effet, les vagues se répandent aussi rapidement pour la famille. Et les impacts les plus concrets, c’est sur le plan organisationnel. Tout d’un coup les familles doivent se mobiliser, s’organiser, une naissance à terme vient chambouler tous les aspects de la vie. Donc quand arrive la prématurité, souvent c’est vécu en plus dans le stress, la peur, l’anxiété, l’inconnu, tout ça n’est pas facile pour les parents. S’il y a la fratrie, c’est difficile de comprendre tous les bouleversements dans la vie des parents et dans leur propre routine surtout s’ils n’ont pas eu la chance de rencontrer le petit bébé. Marie : C’est vrai, pourquoi il revient pas à la maison? Pourquoi maman est toujours à l’hôpital? Véronique : C’est des questions aussi que la famille élargie peut avoir, surtout si les parents aiment garder une petite distance pour peut-être protéger la maman, donc, cela a définitivement des impacts sur la famille et ensuite pour le couple. C’est clair que s’il y avait des tensions, des stress, une naissance prématurée peut les faire remonter à la surface mais aussi, s’il y a de bons mécanismes en place, on voit beaucoup de soutien, d’entraide, de résilience. Puis, ça peut-être beau de voir les parents mais je ne pense pas qu’il y a vraiment une différence dans les émotions qui sont vécues entre les hommes et les femmes. Marie : Ha, ça c’était une question. Véronique : C’est plus l’expression de ces émotions-là. Je pense que ça va varier beaucoup selon la personne, les bagages, les antécédents, les bagages culturels aussi. Marie : Puis Véronique, il y avait des mamans aussi qui m’avaient questionnée en me disant “S’il naît prématurément, je ne pourrai pas l’allaiter?” Je trouve que c’est une bonne question à te poser parce qu’elles se demandent souvent à partir de quel âge on peut mettre un bébé au sein par exemple? Véronique : Oui en effet, c’est clair que nous on encourage énormément l’allaitement et une des premières choses qu’on leur dit c’est que c’est plus que possible d’allaiter oui oui, c’est très encouragé. C’est le meilleur lait qu’il n’y a pas pour soutenir la croissance et le développement et vraiment la santé du bébé, mais ça va se faire différemment. On ne pourra pas mettre le bébé tout de suite au sein. On va plutôt demander aux mamans de commencer à tirer leur lait, travailler leur production pour pouvoir ensuite donner ce lait au bébé via une façon inactive comme vous le disiez par gavage. Et autour de 33-34 semaines, c'est là que le bébé a la maturité pour bien coordonner téter, respirer et... Marie : Avaler. C’est dur de faire ces trois choses là en même temps. Il y en a qui tètent fort fort et ne respirent plus et ils sont tout bleus et ils respirent. Et ils sont drôles. Véronique : Nous on prend ça pour acquis, mais c'est complexe sur le plan neurologique. C’est tout un apprentissage pour les bébés autour de 33-34 semaines, c’est là qu’on peut entamer cet apprentissage qui va se faire sur plusieurs semaines aussi. Marie : Puis, si les mamans, il y en a qui me disaient, “Moi j’ai pas été capable d’allaiter, que le lait ne venait pas, j’étais tellement stressée et je ne sais pas pourquoi j’ai pas produit et j’étais tellement triste!” Mais, on a des alternatives maintenant. Véronique : Bien oui, définitivement. Au début, on a aussi des banques de lait de Héma-Québec qui peuvent nous aider pour certains bébés surtout les plus immatures. Marie : Les plus immature ça c’est plus en bas de 32 semaines? Véronique : Les critères vont varier mais généralement, aux alentours de 32 semaines et moins. Marie : Du lait humain, du lait maternel en banque de lait. Véronique : Des mamans qui ont donné leur lait pour pouvoir nourrir des petits bébés. Ça nous permet beaucoup d’éviter des complications en lien avec la formule. Puis aussi, on a dans les années récentes, beaucoup d’unités néonatales qui se sont outillées de conseillères en allaitement pour vraiment aider les mamans à entamer leur production puis la soutenir. Des fois, il y en a même qui ont la chance de rencontrer les mamans avant la naissance. Marie : C’est vrai, puis au besoin, il y a des solutions, ça peut aider. Puis, voyez les parents, on a parlé jusqu’à date des définitions, des stats, l’impact, la surprise, le choc, tout cela et au-delà de tout cela, il y a du soutien qui est donné à ces familles-là. Véronique : Oui, très rapidement, pareil, on essaie de les mettre en lien avec des organismes. Marie : Des associations. Véronique : Exactement, je pense qu’on s’est beaucoup amélioré dans les dernières années. On essaie vraiment d’encadrer, de les aider à prendre leur place, de leur expliquer ce qui se passe avec leur bébé. Nos infirmières sont vraiment exceptionnelles pour guider les parents à travers cette épreuve-là et les aider à apprivoiser tous les soins. Marie : Qui vont autour de cela. Véronique : Exactement, on est toutes très sensibles à ce que vivent les parents dans l’immédiat donc, tout le monde a un mandat d’essayer de soutenir la famille à travers toute l’expérience. Marie : Autant psychologique qu’organisationnelle. Véronique : Bien sûr, on a des travailleuses sociales et des psychologues aussi pour des parents qui vivent plus de détresse. On a toujours des ressources disponibles pour nous aider et les aider. Marie : Véronique disait tantôt, il y en a qui sont des très grands prématurés qui sont longtemps à l’hôpital. Mais il y a une sortie éventuelle, il y a un congé, il y a un retour à la maison qu’il faut préparer aussi. Véronique : Oui en effet, on sait que la transition va être difficile et on essaie de préparer les parents dès le jour 1. Encore là, c’est un travail exceptionnel de nos infirmières qui vont vraiment soutenir les parents et les habiletés, les faire participer dans les soins du bébé. Marie : Dès l’hôpital, dès la néonatalogie, donner des petits soins de bain, ou changer des couches. Véronique : Exactement, c’est super. ils vont tenir un journal de tous les apprentissages que les parents devraient acquérir pour vraiment maîtriser. Je crois que ça bâtit beaucoup leur confiance quand on a bien maîtrisé tous les soins, on se sent plus à l’aise d’accueillir son petit bébé à la maison Marie : Et le fait que vous l’ayez fait accompagné d’un intervenant à côté de vous a fait toute la différence aussi. C’est pas comme quand on vous donne votre congé après 3 jours, on n’a pas eu quelqu’un longtemps pour vous montrer tous ces soins là. C’est un moment qui est précieux quant à acquérir et la connaissance et l’habileté aussi avec votre petit bébé parce que vous allez rester les parents de cet enfant-là! Véronique : Les parents maintenant ont un plus grand accès à leur bébé que dans les décennies précédentes. On essaie vraiment de favoriser la cohabitation. Souvent, dans plusieurs unités, il y a des petits lits pour les parents pour leur permettre de rester le plus longtemps possible. C’est de les garder présents au chevet, leur donner une voix lors des tournées médicales, stimuler leurs questionnements par rapport à leur enfant, on les encourage par rapport à ça. Marie : Quand il y a le congé de l’hôpital, on les réfère au CLSC? Aux ressources de leur communauté? Vu qu’ils ne viennent pas tous de la région ici. Vous essayez de compenser par les autres services du réseau? Véronique : Oui, c’est clair que quand on est de petite prématurité, on va contacter le CLSC parfois au besoin, une nutritionniste aussi pour des suivis nutritionnels parfois. Il y a des bébé qui n’ont pas nécessairement besoin. On va les aider à trouver un pédiatre ou un médecin de famille pour assurer le suivi. Faire un petit résumé de dossier à leur remettre pour la continuité des soins pour qu’ils puissent faire. Pour les plus grands prématurés, les moins de 28 semaines, il y a plusieurs cliniques de suivi néonatal à travers le Québec qui vont assurer leur suivi médical puis neurodéveloppemental. C’est une grosse équipe : médecin, infirmière et des spécialistes en réadaptation. Marie : C’est plus à long terme! Il faut le dire, tantôt on parlait de l’impact mais il y a aussi des impacts à long terme chez les enfants? Véronique : Oui en effet, c’est clair que pour le long terme, la majorité des prématurés qui sont nés entre 32-37 semaines vont relativement bien. C’est beaucoup de soins au début puis éventuellement, les enfants demeurent avec une petite vulnérabilité pour les infections respiratoires. Les premières années, il faut les protéger et les parents sont souvent très anxieux par rapport à ça. Les extrêmes prématurés sont plus à risque d’avoir des séquelles sur le long terme de leur santé générale avec les petits poumons qui sont encore immatures et qui peuvent nécessiter de l’oxygène. Leur développement, des problèmes avec l’alimentation, tout cela peut persister, puis bien sûr des difficultés avec leur développement qui peuvent être en lien avec des séquelles plus permanentes comme la cécité, la surdité, la paralysie cérébrale et là, on parle d’un petit pourcentage, d’un petit nombre de patients. Marie : C’est bien moins qu’avant! Véronique : Ha oui! Définitivement! Ce qu’on voit le plus fréquemment, ce sont des retards de développement peut-être associés avec des déformations musculo-squelettiques. Des débalancements dans les forces musculaires qui peuvent engendrer des retards moteurs précoces et un retard dans une sphère peut engendrer un retard dans une autre. Mais heureusement, les enfants prématurés répondent très bien aux interventions de réadaptations précoces et de stimulation. Marie : C’est pour cela qu’on n’attend pas, on intervient rapidement. Véronique : En effet, même ces services de réadaptation peuvent s’étendre au-delà de l’âge scolaire. Parfois des enfants peuvent avoir des gros besoins mais éventuellement une grosse partie du développement qui va se normaliser. Marie : On ne rentre pas dans tous les détails. Il y a des parents qui se demandaient, “Mon bébé est né à 32 semaines et ne marche pas à 1 an.” Et là, je leur disais, mais oui, il est né avant alors c’est normal qu’à 12 mois il y en a qui ne marchent pas parce qu’il y a l’âge chronologique et l’âge biologique. Véronique : En effet, il faut toujours tenir compte de l’âge corrigé du bébé. À 24 semaines, rendu à 6 mois d’âge réel, pour nous il n’a pas 6 mois, il a juste 2 mois si on tient compte de sa prématurité. Si on corrige pour la prématurité, il a juste 2 mois et ça c’est important parce qu’on doit voir tout ce qu’il est de développement et qu’on évalue le développement. Marie : Il faut suivre en conséquence. Et c’est pour ça que les parents qui comparent avec leurs amis, avec les enfants de la famille, ils se trouvent déstabilisés des fois en disant : “Pourquoi le mien ne fait pas ça?” Mais n’oublie pas qu’il est né avant, il faut y donner une petite chance. Véronique : Souvent, on doit le rappeler aux parents. Ils oublient, ils demandent “Est-ce que je commence les céréales?” Non non non, il a juste 2 mois. Marie : C’est vrai, c’est vrai, ha, c’est chouette! C’est tout un monde la prématurité. Les parents c’est certain, je pense qu’on a dressé quand même un portrait assez global de la situation. Je voulais vous remercier, je ne sais pas quelle conclusion aimeriez-vous partager aux parents qui vous écoutent? Véronique : À tous ceux qui écoutent, un des messages clés que j’aimerais transmettre, même si la prématurité ça peut être éprouvant pour les familles puis même si les petits bébés prématurés nécessitent beaucoup de soins dans les premières années de vie, beaucoup de services de réadaptation, ça en vaut plus que la peine! Ha oui! Vraiment avec le recul des dernières années, on sait que les enfants prématurés avec ou sans séquelles, ont toutes les chances du monde d’avoir une très belle qualité de vie et aussi de devenir des membres productifs de la société. Donc, pour moi le message est oui, les prématurés vont bien! La très grosse majorité va très bien puis c’est super important je pense de transmettre cette réalité parce que ce n’est pas toujours le message qui a été véhiculé dans le passé par les médias. Marie : Je pense que notre bon vouloir de sensibiliser les gens, Véronique, je pense que cela a bien valu la peine. Mille mercis à toi d’avoir été là pour transmettre ton expertise. Véronique : Ça me fait plaisir, merci à toi. Marie : Ton implication et ton amour des bébés qu’on partage. Bonjour tout le monde et n’oubliez pas, je vous attends sur mon site mariefortier.com pour tout le reste des détails sur les billets éducatifs. À bientôt, au revoir.

La prématurité

Dans cette vidéo, je suis accompagnée de Dre Véronique G Dorval, néonatalogiste et directrice de la clinique de suivi néonatal
Miniature vidéo acupuncture et grossesse

Acupuncture et grossesse

Saviez-vous que l’acupuncture est une pratique alternative sécuritaire pendant la grossesse et pour bébé? En compagnie de Karèya Audet, acupunctrice, et
Miniature vidéo papa et la grossesse

Papa et la grossesse

La place du papa au cours de la grossesse et lors de la naissance est importante. Chaque père vit l’aventure

Découvrir d’autres articles

Marie, dis-moi

Quoi écrire dans le plan de naissance?

Mise à jour 2018-05-01 J’ai lu que je pouvais écrire ce que je voulais pour mon accompagnement pendant mon travail et mon accouchement à la
Comment couvrir le bébé selon la saison?

Comment couvrir le bébé selon la saison?

Sortir un bébé à l’extérieur en période hivernale est possible et sécuritaire pourvu que le poupon soit à l’abri du vent, de la neige, du
Photo - Premiers soins sur un bébé qui s'étouffe

Trucs préventifs de l’arrêt cardiorespiratoire pour bébé, conseils du pro

Quels sont les trucs préventifs et les conseils pour limiter le risque de l’arrêt cardiorespiratoire pour bébé?
Image - placenta-praevia-totalis

Parlons placenta

Mise à jour du billet le 07 décembre 2020 Je sais, ce n’est pas toujours évident de comprendre ce que le médecin vous apprend à

La régression du sommeil

Par Marie Fortier Temps de lecture: 7 min
0